(ME) TISSAGES

Roger Calmé, ZO mag', March 16, 2023

Pièces rapiécées et rapportées, assemblages de natures, mélanges fluviaux, confluences en tous genres : la nature (humaine) est faite d’amalgames. C’est ainsi que la vie va et les petits bateaux aussi. Dans cette affirmation pleine de bon sens, Maliza Kiasuwa construit son travail depuis l’origine. Elle le rappelle toujours, son enfance est hybride.  Entre deux fleuves, entre mille croyances, orthodoxe ou fétiche, son tissage est profondément métisse. Et de la même façon que la chair, l’œuvre plasticienne passe un fil par-dessus l’autre, le raphia au voisinage du synthétique, l’encre chimique et le pigment végétal, en noces de couleurs et de sens. «Ma mère mettait des icônes orthodoxes dans nos bagages quand nous voyageons, et mon père a emmené quelques masques et statuettes qui ont toujours une charge mystique en Afrique. J’ai produit une série d’icônes (…) revisitées et les arts premiers africains sont très présents dans mon travail. » disait-elle au moment de sa première exposition à Londres ( Galerie Sulger Buel, 2018). Ses tableaux sont le fruit de ces alliances naturelles et jubilatoires. Sur ces pas, passent le multiple.

 

Sa nouvelle exposition à Lausanne (Foreign Agent) explore ainsi les ambivalences organiques. A l’image de l’éponge, l’une des plus anciennes créatures terrestres, ses formes ouvrent des ventres féconds remplis de toutes les possibilités.  L’éponge absorbe et restitue, elle efface et prolonge, elle absout et recompose le liquide. A cette fin, Maliza Kiasuwa coud le luffa et le polyéthylène, dans une conjugaison très probable de ce que nos chairs contiennent de possibilités. La terre est une digestion lente et inflexible, dont on lit dans la masse minérale les prodigieux hasards.

 

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